marchés publics
Les marchés publics constituent un enjeu central pour le secteur de la construction.
De manière générale, constructionromande relève que les démarches administratives pour accéder aux marchés publics sont très lourdes, en particulier pour les PME, et mériteraient d’être simplifiées pour que les entreprises plus modestes ne soient pas pénalisées.
La révision totale de la loi sur les marchés publics (LMP), adoptée en juin 2019, constitue un changement de paradigme important et bienvenu, s’agissant notamment des critères d’adjudications des marchés. Des notions fondamentales, comme les considérations éthiques, sociales, environnementales et de développement durable, se retrouvent enfin dans la loi. L’adjudication d’un marché à l’offre la mieux-disante (meilleur rapport qualité/prix) est désormais une obligation, en lieu et place de la seule prise en compte du prix le plus bas. Enfin, l’obligation de respect des conditions sociales du lieu d’exécution est confirmée, le Parlement ayant heureusement corrigé le projet initial du Conseil fédéral qui remettait ce principe cardinal en cause.
Dans la foulée de l’adoption de la LMP, le nouvel Accord intercantonal sur les marchés publics (AIMP) a également été adopté en novembre 2019 par les Cantons, réunis au sein de l’Autorité intercantonale pour les marchés publics. Le nouvel AIMP se veut le plus proche possible de la LMP, ce qui est positif, mais s’en écarte partiellement sur l’enjeu du respect des conditions sociales en se contentant d’exiger celles en vigueur au lieu du siège de l’entreprise en Suisse, tout en laissant des compétences d’exécution aux Cantons sur ce point. Il s’agit de veiller à ce que ces compétences d’exécution soient pleinement utilisées afin d’éviter la concurrence déloyale, tout en rappelant que les métiers de la construction sont pour leur grande majorité soumis à des conventions collectives de travail (CCT) étendues et de force obligatoire.
L’avancée positive que constitue la nouvelle LMP ne doit malheureusement pas occulter le fait que le Conseil fédéral a maintenu dans la nouvelle Ordonnance sur les marchés publics (OMP) le principe du droit de regard des autorités sur la formation des prix (art. 24 OMP). Ce droit de regard prévoit également une obligation de remboursement d’une part des prix a posteriori (le contraire, soit une hausse du prix, étant par contre explicitement exclu).
Pourtant, ce principe avait été rejeté en procédure de consultation et, surtout, biffé par le Parlement lors des travaux sur la nouvelle LMP. Ce principe constitue en effet une atteinte lourde et injustifiée à la liberté contractuelle. Alors que l’on se trouve face à un silence qualifié du Législateur, le Conseil fédéral passe en force en réintroduisant ce principe dans l’OMP, sans aucune légitimité pour ce faire et en contradiction flagrante avec la décision parlementaire. constructionromande demande instamment que le Conseil fédéral corrige la nouvelle LMP en supprimant l’art. 24, respectant ainsi tant la volonté du Parlement que la logique fondamentale du droit des contrats « pacta sunt servanda ».
Au-delà des améliorations apportées par la nouvelle LMP et l’AIMP révisé, la priorité doit maintenant être l’intégration de ce changement de paradigme dans les pratiques et la culture administrative des autorités adjudicatrices. La valorisation de la qualité de la prestation en lieu et place de son seul prix doit devenir la norme. L’accent porté sur le rapport qualité-prix ne profitera pas seulement aux collectivités publiques, mais à l’ensemble de l’économie. Les entreprises doivent en effet pouvoir valoriser les efforts consentis en termes de formation professionnelle, de respect des normes environnementales et d’utilisation de matériaux durables et certifiés. Une première étape doit ainsi rapidement être franchie : la non-entrée en matière sur les offres dont le prix est anormalement bas, ne permettant objectivement pas le respect des normes environnementales et sociales en vigueur
Priorités
- Application conséquente des avancées de la nouvelle LMP et de l’AIMP révisé par les autorités adjudicatrices.
- Mise en concurrence au niveau de la prestation et non par le prix.
- La durabilité de la prestation (coût du cycle de vie, aspects techniques, matériaux, matériaux, etc.) doit être valorisée autant, si ce n’est plus, que le prix.
- Exiger le maintien du respect des conditions sociales et de travail du lieu de la prestation.
- Supprimer, dans la nouvelle OMP, le droit de regard des autorités adjudicatrices.
- Renforcer l’interdiction d’entrer en matière sur des offres anormalement basses.
- Offrir une base légale aux outils d’aide pour calculer les prix (séries de prix et tarifs indicatifs par exemple), indispensables aux pouvoirs adjudicateurs, afin d’éviter les prix fantaisistes et le dumping (à ce sujet, se référer aussi au chapitre 5 relatif à la politique de la concurrence).
- Cadrer strictement les activités des entreprises publiques ou parapubliques dans le cadre des marchés publics. Il n’est pas acceptable que celles-ci abusent de leur position dominante et privilégiée pour effectuer des soumissions en concurrence avec les entreprises privées. Il s’agit là d’un enjeu de bonne gouvernance économique et de fonctionnement optimal de la concurrence. Voir également le chapitre 6 Politique de la concurrence à ce sujet.
Autres mesures
- Imposer la création de listes de soumissionnaires qualifiés.
- Limiter le nombre d’offres dans la procédure de gré à gré qui doit demeurer une procédure simplifiée.
- Privilégier l’adjudication strictement locale pour des travaux usuels de peu de technicité, pour raisons économico-sociales (économie locale, favoriser les circuits courts, soutien à la formation professionnelle, etc.), permettant également une meilleure réactivité en cas d’urgence et un meilleur suivi (proximité du lieu de la prestation et possibilités de service après-vente, etc.).
- Assurer aux entreprises suisses l’accès à la main-d’œuvre étrangère dans le cadre de soumissions ouvertes à l’international.